Benjamin Georjon

« Créateur d’émotions »

Lorsque l’on rencontre Benjamin Georjon, c’est d’abord sa présence physique, indéniable, que l’on remarque. Mais c’est son humanité que l’on retient de lui, tant il déborde de sensibilité. Artiste aux multiples casquettes issu du monde du théâtre, il officie notamment depuis plus de 15 ans dans les musiques actuelles en tant qu’homme de l’ombre à travers son travail de monteur de spectacle où il devient “les yeux de l’artiste dans le public”. Il a entre autre collaboré avec Catherine Ringer, Romeo Elvis, La Rue Ketanou ou encore Minuit… Rencontre.

Benjamin
On te laisse te présenter ?

Benjamin Georjon, réalisateur de spectacle, comédien, auteur et dramaturge… Mais aussi humain, père, compagnon, fils, et confiné.

Tu te définis comme «réalisateur de spectacle», peux-tu nous en dire plus ?

Cela fait quinze ans que je fais du coaching dans les musiques actuelles, j’ai été repéré par Philippe Albaret et Jean-Louis Foulquier, qui m’ont accueilli au sein du chantier des Francofolies pour être formé et renforcer l’équipe de l’époque. Les années passant, ma vision du coaching a évolué et ma vision de la création d’un spectacle s’est enrichie. Enrichie par mes expériences personnelles en tant qu’acteur, au contact des metteurs en scène, des scénographes, des constructeurs, des créateurs lumière, et des réalisateurs avec qui j’ai collaboré.

La création d’un spectacle dépend d’un ensemble de personnes maîtrisant des compétences et un langage propre. Mon rôle en tant que réalisateur de spectacle est de coordonner toutes ces compétences et de libérer l’artiste en scène de toute contrainte, afin qu’il puisse s’exprimer le plus pleinement et librement possible. Je travaille en étroite complicité avec l’artiste en scène qui reste le seul patron de son projet. C’est ça un réalisateur de spectacle.

Qu'est-ce que tu aimes dans le coaching scénique ?

Les salles noires, le huis-clos avec des êtres sensibles, leur univers qu’ils me confient, la confiance qu’ils m’accordent, la complicité qui se tisse sur quelques jours, ou plusieurs années. Et bien sûr la naissance, la naissance d’un instant programmé qui reprend vie chaque soir de manière différente selon le public qui l’accueille.

Quels sont les challenges auxquels tu es généralement confronté ?

La première chose qu’il faut savoir c’est que chaque résidence est unique. Il n’y a pas de recette, il faut réinventer à chaque fois. Moi, mon obsession, c’est l’identité. Plus l’identité est forte, plus le projet sera écouté. Ce qui est passionnant chez l’artiste en développement c’est qu’il cherche son chemin et moi je l’accompagne afin qu’il le trouve et qu’il commence à le gravir. Mais, à certains moments de la vie, ou à chaque spectacle le chemin est accidenté et les artistes confirmés, eux aussi, parfois ont besoin d’être accompagnés.

 

Un moment fort à nous partager ?

Un matin de fin d’hiver, je marche en direction de la piscine, l’air est glacé, la lumière froide : j’adore nager. Mon téléphone sonne, je décroche, une voix de femme, de vraie femme, rapide et éraillée :

– « J’ai vu ton travail, c’est bien. »
Moi : « Merci. »
– « On est cinq, on va partir en tournée, et on rentre bientôt en résidence, t’es libre ? »
Moi : « Pardon ? »
– « T’es libre bientôt ? j’aimerais bien travailler avec toi. »
Moi : « Attendez, je suis très occupé… vous êtes qui ? »
– « Catherine Ringer »
Moi : « Pas de souci, où vous voulez qu’on se rencontre ? »

Un instant, j’ai cru que c’était une blague, et, en fait, non. Voilà, je l’ai rencontrée et on a travaillé ensemble sur son dernier spectacle tiré de l’album Chronique et fantaisie. Catherine a été d’une grande élégance tout au long du travail. Voilà, j’ai collaboré avec un monstre sacré de la scène française qui a bercé mon enfance et j’en suis très heureux.

 

Catherine Ringer
Tu travailles aussi bien avec des artistes solo que des groupes ?

Oui, je travaille avec des artistes solo, des groupes, des collectifs, de tous genres musicaux, je n’ai aucune limite.
Le travail diffère un peu quand c’est un groupe, parce que les réflexions sont collégiales et les rapports de pouvoir souvent complexes. Le groupe est une tribu et moi, je viens bouleverser l’organisation de cette tribu. Donc, à moi de bien identifier le rôle et le positionnement de chacun. Parce que n’oublions pas que l’essence de mon travail est la remise en question de la façon d’aborder son œuvre.

 

Un artiste avec lequel tu aimerais collaborer en particulier, ou avec lequel tu aurais aimé collaborer ?

Il y en a plusieurs chez les morts, Joy Division et Bashung ; chez les vivants PNL, Cure, Bon Iver, Sébastien Tellier. Ah oui !!! Dick Annegarn ça me ferait bien triper. J’avoue être assez gourmand de rencontres.

 

Tu peux nous en dire plus sur Les Invincibles ?

Les Invincibles, c’est une série de podcasts sur un des derniers quartiers populaires de Paris : la Goutte d’Or. Il y aura un épisode par semaine d’octobre à juin. C’est un diptyque, une première partie, dite « Fiction poétique » et une seconde partie dite « Documentaire ». En effet, la première partie est le fruit de mon imagination, je projette la vie d’une personne croisée dans ce quartier de la Goutte d’Or. Qui n’a jamais rêvé la vie d’une personne rencontrée dans le courant de sa vie ? La deuxième partie est le témoignage d’un habitant du quartier qui vient faire écho à cette vision. Tout ça mis en musique par mon acolyte, Arnaud Vernet. Cette création est une aventure artisanale et humaine, tous mes partenaires sont géniaux et les gens rencontrés fascinants ; j’espère que vous viendrez écouter nombreux.

On te laisse le mot de la fin !

Et bien : « Bisous ! » Tu sais, ce « bisou ! » que tu lâches à la fin d’un coup de téléphone avec un producteur, et tu te dis pourquoi j’ai dit ça, je suis complètement con ou quoi ? Alors : Bisous KAO !